La 2e édition du “Café du monde” organisée par l’Association démocratique des Français à l’Étranger (ADFE) section Côte d’Ivoire, s’est tenue le 8 avril dernier au Buschmen café sise à Abidjan Cocody, autour du thème : « L’égalité entre les femmes et les hommes : quelle réalité en Côte d’Ivoire ? »
Une question qui a amené les trois brillantes panélistes, enseignantes à l’université Houphouët-Boigny et chercheuses sur les questions d’égalité de genre, à parler de l’efficacité des politiques du genre en Côte d’Ivoire et de l’accès aux soins à la représentativité parlementaire, là où il y a toujours un écart important entre les discours et le réel du quotidien de douze millions d’ivoiriennes.
L’objectif de cette activité, selon les organisateurs, « c’est de créer un cadre d’échange sur des sujets réels qui touchent la société ivoirienne.»
La Professeure Aimée-Danielle Lezou Koffi, a posé le cadre en tant qu’invitée principale. C’est-à-dire, poser la réalité d’égalité hommes-femme en Côte d’Ivoire comme un paradoxe qui a relevé les écarts entre l’engagement de l’État pour la promotion de la femme, pour l’égalité de l’homme et de la femme à travers l’arsenal d’outils institutionnels et juridiques, et la réalité sur le terrain qui est bien loin du projet de l’État.
« Même si on peut voir des évolutions, sur le terrain il y a des outils qui sont mis en place mais qui ne sont pas opérationnels qui rendent difficile cet engagement de l’État. De plus, quand on dit qu’il faut 30% de représentativité des femmes dans les instances de décisions, on est surpris de voir que dans le nouveau gouvernement nous en sommes à 19%. On se demande si la volonté politique y est vraiment ? », a-t-elle réagi.
Selon Dr Kouassi Valérie, au niveau politique, elle estime que le quota de 30% qui est imposé par la loi n’est pas encore respecté. « La Côte d’Ivoire est encore très loin d’atteindre ce quota parce qu’aux postes électifs et de nomination, on est encore très loin des 30%. Il reste encore beaucoup à faire, c’est-à-dire que le politique doit s’impliquer davantage. Il faut que les femmes aussi puissent se lever pour lutter afin qu’on puisse atteindre les 30% et aller au-delà », a-t-elle déclaré.
Elle a ajouté qu’« Il faudrait que le jeu politique soit revu pour que les femmes puissent avoir accès aux prises de décisions. Il faudrait que le compendium des compétences féminines, qui est un outil d’aide aux prises de décisions soit redynamisé pour qu’on puisse puiser des femmes de haut niveau capables d’influencer la vie politique et la vie publique. D’autres solutions existent au niveau de l’éducation: rééduquer les femmes à mieux éduquer leurs enfants (garçon ou fille) pour que l’égalité des genres soit vraiment réelle ».
Pour Dr Anne Marilyse Kouadio, les choses ne bougent pas réellement au niveau de l’éducation contrairement aux intentions affichées. Elle estime que la gratuité de l’école n’est pas une réalité.
« On peut retenir que les lignes bougent, l’État de Côte d’Ivoire prend des dispositions qui prennent du temps à se traduire concrètement. Par exemple, la gratuité de l’école n’est pas effective. Cela constitue un obstacle majeur pour les parents qui devront mettre la main à la poche pour respecter l’obligation de scolariser les enfants entre 6 et 16 ans. 36% des enfants qui vont à l’école ne finissent pas le cycle primaire. Plus de 25% d’enfants qui doivent être à l’école n’y sont pas. Et dans cette proportion, la majorité est constituée de filles », a-t-elle soutenu.
« 44% du budget national doivent être alloués à l’éducation, mais cette proportion est-elle respectée ? » s’interroge-t-elle.
Poursuivant, elle laisse entendre qu’« un Etat fort, est un Etat qui forme sa population. L’éducation, ce sont les deux genres, ce sont les filles et les garçons ”. Cela doit être une éducation au-delà des slogans politiques, elle doit être une priorité dans les détails. Former une femme ; c’est former une nation. La Côte d’Ivoire n’a pas opté pour l’égalité des sexes, mais la Côte d’Ivoire a opté pour l’équité. La femme doit savoir qu’elle est un acteur de développement, mais il y a des paradigmes qui doivent changer. La femme et l’homme sont complémentaires .»
Les interventions ont été suivies de questions et de contributions enrichissantes notamment avec le partage d’expérience de femmes ayant été pionnières dans le combat de l’égalité des femmes et des hommes en Côte d’Ivoire.
Divers sujets découlant de la place de la femme ont été abordés comme l’accès à la propriété, les questions de succession, la grossesse précoce. Le débat s’est achevé avec une conclusion optimiste pour encourager les femmes.
Rendez-vous est pris en mai pour le prochain café du monde sur l’économie du cacao.
Patrick Kouamien