Le Giec, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, publie son rapport spécial ce mercredi 25 septembre sur les conséquences du réchauffement climatique sur les océans et la cryosphère, c’est-à-dire la partie glacée de la planète. Ce rapport compile les mises à jour des dernières données scientifiques.
Les océans et les zones gelées, victimes du réchauffement climatique, dépérissent à grande vitesse, menaçant des pans entiers de l’humanité qui doit réduire au plus vite ses émissions de CO2 pour limiter les dégâts, avertit ce mercredi un rapport alarmant du Giec.
Des changements déjà « irréversibles »
Montée du niveau des océans d’au moins d’un mètre d’ici 2100, petites îles menacées de submersion, glaciers qui disparaissent… Certains des impacts dévastateurs du changement climatique sont déjà « irréversibles », note le groupe d’experts climat de l’ONU à l’issue d’une réunion marathon de cinq jours à Monaco.
Comparées aux rapports précédents, toutes les estimations sont pires. « Si on voit les chiffres concernant l’élévation du niveau de la mer, ils sont encore supérieurs au dernier rapport du Giec sur le 1,5°C sorti il y a quelques mois », commente Ludovic Frère-Escoffier, responsable du programme vie des océans au WWF France.
« Si nous sommes dans un scénario à 2°C, il n’y aurait plus de récif corallien. Ce ne sont pas simplement de belles zones à regarder, c’est un endroit qui permet à 500 millions de personnes d’y vivre. C’est un endroit où une espèce sur trois de l’océan va se retrouver. Il y a donc un impact sur la faune et la flore avec un appauvrissement très fort de la biodiversité des rivières, des estuaires et des côtes, là où se reproduisent les espèces que l’on trouve dans l’océan et qui permettent à 3 milliards de personnes de se nourrir en protéine animale via la pêche », s’alarme Ludovic Frère-Escoffier.
« Des centaines de milliards de dollars »
Le niveau des océans a augmenté 2,5 fois plus vite au début du XXIe siècle qu’au XXe, et va continuer de s’accroître. « Cela va redéfinir les littoraux du monde entier, là même où la population est concentrée », explique Bruce Glavovic, de l’université Massey en Nouvelle-Zélande.
Sur ces côtes, construire des protections contre la montée des eaux pourrait réduire de 100 à 1 000 fois les risques d’inondations, selon le rapport. À condition d’investir « des dizaines à des centaines de milliards de dollars par an ».
Au total, selon le rapport, plus d’un milliard de personnes vivront d’ici le milieu du siècle dans des zones côtières peu élevées particulièrement vulnérables aux inondations ou à d’autres événements météo extrêmes amplifiés par la montée du niveau de la mer et le dérèglement climatique.
Même dans un monde à +2°C, de nombreuses mégapoles et petites îles devraient être frappées d’ici 2050 au moins une fois par an par un événement extrême qui ne se produisait jusqu’alors que tous les 100 ans.
280 millions migrants climatiques d’ici 2100
Les océans, qui couvrent plus de 70% de la surface du globe, ont absorbé environ un quart de ces émissions et 90% de la chaleur supplémentaire générée par le CO2 produit par l’homme.
L’océan joue un rôle clé dans la stabilisation du climat, il absorbe la chaleur atmosphérique et le CO2. La cryosphère, l’ensemble des glaces sur Terre, est elle aussi un puissant puits de carbone et de chaleur.
Mais cette action des océans et de la cryosphère a un prix : les océans s’acidifient, perdent leur oxygène et voient leur niveau s’élever. Ces changements provoquent notamment une diminution du plancton, la nourriture principale des poissons, et donc un déplacement des bancs de poissons.
Les glaces fondent à des rythmes différents et avec des conséquences plus ou moins graves. Par exemple, si le permafrost, la terre gelée, fond, cela libère du CO2 et du méthane, un très puissant gaz à effet de serre. Les parties gelées du globe qui fondent ont pour résultat une élévation du niveau de la mer.
Dans le pire des scénarios, 1 milliard de personnes seraient touchées par l’élévation du niveau des mers d’ici 2050 et il pourrait y avoir 280 millions migrants climatiques d’ici 2100.
Les solutions existent déjà
Depuis 1993, le réchauffement de l’océan a plus que doublé. La première conséquence est un accroissement des cyclones. Dans un scénario à +1°C et demi d’ici 2100, leur fréquence pourrait être multipliée par 20, et par 50 dans le cas de 3 ou 4°C supplémentaires.
L’un des objectifs du rapport du Giec est d’apporter aux politiques des éléments pour pouvoir agir. Et il devrait aussi donner des pistes de solutions. La première est connue depuis longtemps : il faut réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre, et cela sans attendre.
Ce rapport adopté par les 195 États membres du Giec est le quatrième opus scientifique de l’ONU en un an à tirer la sonnette d’alarme sur les impacts du dérèglement climatique et à pointer des pistes vers les façons d’y remédier ou au moins les limiter.
rfi