La fondation Friedrich Ebert Stiftung en partenariat avec l’Internationale de l’éducation (IE) a organisé un atelier sur la privatisation de l’école en côte d’Ivoire. C’etait le 05 avril 2019 à l’école d’architecture d’Abidjan.
L’objectif ultime de cet atelier était le lancement public du rapport de la recherche sur la privatisation de l’école en Côte dIvoire.
Plus spécifiquement, l’atelier a visé à utiliser les conclusions de la recherche sur la privatisation en Côte dIvoire pour :
sensibiliser le gouvernement, les agences inter-gouvernementales et la société en général que la prestation de léducation publique de qualité pour tous reste lun des piliers fondamentaux dune société juste et équitable
démontrer que la privatisation sape lenseignement public et est préjudiciable aux intérêts de la société
rappeler que lobjectif de développement durable N°4 sur l accès de tous à une éducation gratuite de qualité, sur un pied dégalité, et la promotion des possibilités dapprentissage tout au long de la vie ne peut être atteint à échéance si lécole devient un service lucratif.
Une étude commissionnée par l’Internationale de l’Education, menée par deux chercheurs de premier plan, démontre que la Côte d’Ivoire doit réorienter ses investissements en matière d’éducation vers le secteur public et stopper la privatisation de l’enseignement.
L’« Etude sur la privatisation de l’école en Côte d’Ivoire », par les Drs Koutou N’Guessan Claude et Goi Bi Zamblé Théodore, lancée le 5 avril dans le pays, à Grand Bassam, insiste sur le fait que depuis les années 80, devant la demande croissante en éducation et l’insuffisance des structures d’accueil publiques, l’Etat a décidé d’autoriser l’ouverture d’écoles privées sur l’ensemble du territoire national à travers une convention de concession de service public. S’en est ensuivi un développement des écoles privées sur l’ensemble du territoire ivoirien pour répondre à la forte demande en éducation, un développement anarchique et loin d’assurer un enseignement de qualité pour tous les étudiants.
L’enquête, menée dans 18 établissements dont 15 à Abidjan et 3 à Daloa, auprès de 286 élèves, 90 enseignant·e·s, et 32 parents d’élèves, insiste notamment sur le fait que les écoles privées ne sont pas toujours propres, et sont même jugées très sales comme l’indique 52 % des apprenant·e·s interrogé·e·s, et les élèves avouent ne pas être en sécurité. Et moins d’un·e apprenant·e·s sur cinq bénéficie d’une bibliothèque au sein de son établissement d’enseignement, et près de 65 % des apprenant·e·s indique ne pas avoir de salle d’informatique sont absentes dans son établissement.
Au niveau des enseignants, 50 % ont moins de 5 années d’expérience : comme recruter un·e enseignant·e diplômé·e d’une institution de formation des formateur·rice·s est coûteux pour les établissements privés, leurs fondateur·rice·s préfèrent réduire les charges en recrutant majoritairement des enseignant·e·s peu qualifié·e·s pédagogiquement. Par ailleurs, les enseignant·e·s évoluent dans des situations contractuelles précaires, les contrats n’étant pas toujours explicites selon 71 % des interrogé·e·s. Et pour les 29% des enseignant·e·s qui affirment bénéficier d’un contrat de travail, ils·elles précisent que ce dernier n’est pas toujours respecté et que le paiement de leur salaire dépend fortement du bon vouloir de l’employeur.
Il faut savoir que, selon l’étude, la principale difficulté à laquelle la majorité des écoles privées de Côte d’Ivoire est confrontée est clairement d’ordre financière. Ce problème est soit lié au retard de paiement des subventions par l’Etat, soit à la difficulté de recouvrement des frais de scolarité dus par les parents d’élèves. Il a ainsi un impact négatif sur le bon fonctionnement des écoles privées et réduit de façon considérable la qualité de la formation.
« A chaque rentrée scolaire, de nouvelles écoles sont ouvertes par de personnes pour qui le plus important, ce n’est pas la qualité de la formation reçue, mais gagner plus d’argent, en un mot, la marchandisation », condamne fermement le Secrétaire général de l’Internationale de l’Education, David Edwards.
Il poursuit en précisant qu’« avec nos affiliés et les enseignantes et enseignants ivoiriens, nous refusons de voir les enfants du pays se voir dénier une éducation de qualité, apportée par des enseignants et des personnels de soutien à l’éducation de qualité, dans des environnement de qualité et avec du matériel pédagogique de qualité. Nous ne baisserons pas les bras et continuerons d’explorer d’autres alternatives pour réduire dans un premier temps, et arrêter dans un second temps la marchandisation de l’école. »
Il souligne enfin que « cette étude constitue un premier pas pour faire retrouver à l’école ivoirienne son lustre d’antan », et, pour atteindre cet objectif, invite vivement l’Etat ivoirien « à réorienter ses investissements en matière d’éducation dans la construction et la réhabilitation des établissements publics et réduire de façon drastique, voire, renoncer au financement des écoles privées ».