Des chefs traditionnels du centre-ouest de la Côte d’Ivoire, ont confié lundi une mission de “réconciliation” à l’ancien président Laurent Gbagbo, rentré triomphalement la veille dans son village natal de Mama, après son acquittement par la justice internationale.
Venus de toutes les contrées de cette région productrice de cacao, les chefs traditionnels majestueusement drapés dans des pagnes colorés, ont rencontré M. Gbagbo dans sa résidence de Mama dont il n’est pas sorti de la journée, a constaté un journaliste de l’AFP.
Mais il devait se rendre dans la soirée sur la place publique du village où l’attendent ses admirateurs et partisans.
“C’est sa présence qu’on attendait pour la réconciliation. Il faut qu’il s’appuie sur sa popularité pour appeler le peuple ivoirien à la réconciliation totale”, a déclaré à l’AFP Joseph Goli Obou, le “chef des terres” de Mama, une autorité locale, entouré de notables.
Ces chefs traditionnels devraient également participer à une cérémonie destinée à le “purifier”, comme le veut la tradition de son ethnie bété pour quelqu’un qui a été emprisonné et libéré.
– “Rendre la paix” –
“Demain (mardi) quand je vais le purifier, je vais lui demander d’être au service de la réconciliation, que ses premiers mots à la nation aillent dans le sens la réconciliation”, a affirmé le “chef des terres”, affirmant être mandaté par ses pairs pour cette cénérmonie.
“En pays bété, lorsqu’un membre de la famille sort d’une situation difficile, on lui fait une purification. Celle-ci consiste à le laver au seuil de sa porte très tôt le matin, avant le lever du soleil, avec une mixture à base de rameaux et de feuilles traditionnelles Kpobrai et Titai”, explique le chef septuagénaire.
Au terme de la cérémonie de purification, M. Gbagbo pourra officiellement s’adresser à la nation, comme le veut aussi la tradition, selon lui.
En attendant son apparition dans la soirée, les personnes réunies sur la place publique de Mama, dansent et chantent, sans impatience.
“Gbagbo est venu pour rendre la paix dans la nation”, s’exclame Brigitte Koudou, venue du village mitoyen de Zébizékou.
“Je suis en joie, cette journée est particulière. Le président Gbagbo est libre. On veut l’entendre, qu’il dise seulement un seul mot”, déclare de son côté Béatrice Djédjé, venue de Kpakpékou, un rameau en “signe de paix et de réconciliation” à la main.
– Arrivée mouvementée à Abidjan –
Plusieurs milliers de personnes lui ont réservé dimanche un accueil triomphal à Mama, dix jours après son retour à Abidjan à la suite de son acquittement par la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye, où il était notamment poursuivi pour crimes contre l’humanité.
A son arrivée, vêtu d’une chemise blanche et souriant, il s’était adressé à ses admirateurs, les remerciant “d’être venus si nombreux”. “Dix ans (d’absence) c’est beaucoup, demain (lundi) je vais vous donner des nouvelles”, avait-il ajouté.
Son retour à Mama n’a donné lieu à aucun incident, contrairement à son arrivée le 17 juin à Abidjan, marquée par de nombreux accrochages entre les forces de l’ordre et ses partisans qui voulaient l’accueillir près de l’aéroport.
Laurent Gbagbo, au pouvoir depuis 2000, avait été arrêté en avril 2011 à Abidjan, puis transféré sept mois plus tard à la CPI afin d’y être jugé pour les violences commises à la suite de la présidentielle de fin 2010. Son refus de reconnaître sa défaite face à Alassane Ouattara avait provoqué une crise post-électorale sanglante ayant fait 3.000 morts.
Réélu en octobre 2020 pour un troisième mandat controversé, M. Ouattara a donné son feu vert au retour de Laurent Gbagbo quelques jours après son acquittement par la CPI.
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